Ashansha passait de plus en plus de temps accoudée à la palissade, tous les soirs le regard perdu dans le soleil couchant, contemplant la vaste désolation qui s'étendait au delà de la forêt des environs de la communauté.
Elle était chaque jour un peu plus déçue de l'application de ce Projet qui l'avait pourtant intimement convaincue depuis longtemps et qui avait motivé sa visite à Arkham.
Elle avait été surprise de l'effort de ses dirigeants non assumés pour sortir du paradoxe inhérent à toute communauté refusant tout système mais désolée de les voir glissant peu à peu vers une de ses variantes déjà obsolètes avant le Crash.
Convaincue de l'inutilité des palabres qui accompagnent tout regroupement d'humains, choquée puis amusée de l'acharnement puéril de Gally dont elle avait été malgré elle un des témoins, elle s'enfonçait dans un silence de plus en plus présent, que le bruit des vents auquel elle était habituée ne couvrait pas derrière tous ces murs.
Elle dormait de moins en moins, repensant à ce qu'elle avait laissé derrière ces palissades.
Rub'Al Khali, le quartier vide la hantait...des mots entendus il y a bien longtemps lui revenaient chaque nuit... "ceux qui osent pénétrer dans sa désolation sont engloutis pas ses sables, et la poudre de leurs os vient enrichir sa poussière."... "Personne ne peut poser les yeux sur un tel vide et retourner dans son foyer sans avoir perdu à jamais une partie de lui-même" ..."Et les rares miserables qui meurent dans leur lit meurent sans voir les visages pleins d'amour de ceux qui les entourent mais gardent les yeux fixés sur cette désolation qui les appelle comme seul l'Abime peut vous appeler en promettant à votre âme le baume du néant".
...Le Desert et ses voyageurs l'appelaient de nouveau, bientôt elle reprendrait la route, avec ou sans soutien de cette communauté à laquelle elle avait quelques courtes lune cru appartenir.
Elle était nomade avant tout, et de nouveau prête à ne pas le laisser choisir.