Intronisation, on remet ça

L'arrière salle a été rarement utilisée ces dernières lunes, c'est pourquoi elle sent un peu le renfermé. Malgré tout, c'est là que Gouranga avait donné rendez-vous à ceux qui avaient manifesté leur désir de devenir des activistes. Assis côte à côtes et face à lui se trouvaient, dans l'ordre non alphabétique, Cixi, Natalya, Seth, Ariakas et Amanda.

Plusieurs de ces personnes connaissaient plus ou moins bien le colosse d'ébène, mais en cette occasion, ce n'était pas l'homme du quotidien, mais l'activiste du Projet KO, qui parlais. En ces termes, pour être précis :

-Hum, j'parie que vous z'êtes tous très excités à l'idée d'devenir des activistes. J'entends presque les vagissements intra-utérins des plus féminines d'entre vous, à croire que Delon est toujours dans les parages, héhé...donc c'est l'moment d'vous faire redescendre sur terre. Le Projet KO, c'est pas l'club Med. J'irai pas par 4 chemins : le Projet, c'est une organisation anarchiste dont l'but est d'foutre en l'air toute forme d'organisation d'l'homme, par tous les moyens, la violence la plupart du temps.

D'un geste de la main, il interromps d'éventuelles questions, et continue :

-Avant même que vous n'me répondiez des conneries découlant du traitement Ludovico* qu'a été votre éducation, j'tiens à vous préciser que j'en ai rien à battre d'vos opinions, ni même d'vos raisons. C'est à vous d'trouver vos propres raisons d'justifier l'anarchie. Certains font ça parce qu'ils ont des idéaux spécifiques, d'autres n'en ont rien à carrer d'l'anarchie et font ça juste pour l'éclate. Mais même s'il y a une part d'violence incompressible dans l'combat du Projet KO, l'but n'est pas d'buter tout l'monde. Notre ennemi, c'est l'ordre, pas ses esclaves. "Car la guerre est juste quand elle est nécessaire", comme disait l'autre**.

Il lance un regard sans équivoque à Amanda et à Natalya, qui sont certainement les deux personnes les plus violentes de la pièce, et reprend :

-Ensuite, une mise au point sémantique importante : le Projet KO est une organisation anarchiste, pas anarchique. Ca veut dire que malgré l'absence de hiérarchie entre les activistes, le Projet est très bien organisé. Stratégie, logistique, espionnage et désinformation, on ne laisse rien au hasard. C'est pas que ça nous plaît, mais on n'a pas le choix pour imposer notre vision d'l'homme.

Après quelques instants de silence, le temps de laisser ses mots bien s'imprimer dans le cerveau de ses interlocuteurs, il reprend :

-J'pense que les moins ahuris d'entre vous commencent à piger que c'est pas aussi génial que ça de devenir activiste : ça demande d'accepter d'se sacrifier et d'sacrifier sa liberté pour les autres, en rentrant dans une organisation très structurée. A vous d'voir si c'est vraiment c'que vous voulez, mais sachez qu'une fois activiste, vous n'allez plus vous branler la nouille peinards à rien foutre : il faudra vous bouger vos p'tits culs pour faire avancer les choses. Maint'nant que c'est clair, est ce qu'il y a encore des inconscients parmi vous qui veulent toujours en être ?

Avec un sourire indéfinissable, où se mélangent l'ironie, l'amusement et une certaine complicité, il se croise les bras, attendant les réactions des postulants...

[HRP :
* Pour comprendre ce qu'est le traitement Ludovico, regardez Orange Mécanique, un excellent film de Stanley Kubrick
** C'est une citation du Prince, de Machiavel ]

Natalya lève le bras, comme à l'école pour prendre la parole. Bien éduquée, hein? Bof, en fait.


"J'croyais avoir été claire, non? M'en tape de la mascarade. M'en tape de la manière. Sans idéologie, sans rêves pour se raccrocher, on peut pas survivre dans c'désert pourri. Ca veut pas dire que je serai une chienne à son maître, mais seulement que not' but est commun. Donne ton papier, je l'signe. A moins qu'ici on signe avec son sang .. Ou celui des autres, peut-être?"


Un regard sur le côté aux autres candidats-anarchistes. La junkie sourit.



"Belle brochette. Z'ont pas l'air brillants les gugus. Ils savent causer?


Bref. L'absence d'ordre n'est pas le chaos. L'Ordre prostitue l'être humain. Il l'a prouvé, il nous a foutu à la rue, hein, comme on dit. Alors, aujourd'hui, tous ceux qui espèrent reconstruire l'erreur de leur blanches mimines devront renoncer à leurs idées, ou renoncer à leurs vies. La voilà, ma philosophie. On encule ceux de l'Ordre, on en épargne les victimes. Point."

Ariakas prends la parole à son tour

Y sont pas brillant parle pour toi cocotten franchement t'as pas l'air brillante toi non plus tu te donnes des grands airs mais enfin bon...


En venant à Arkham, j'ai entendu quelques brides de votre projet, je veux en fair eparti, tout simplement pour exister en temps qu'individu et en tant qu'entité.

Sourire aux lèvres, Natalya fouille ses poches et en tire un débris de cigarette roulée au contenu douteux.


"Exister en tant qu'entité? Tu t'écoutes parler, sérieux. Ca veut rien dire, encore moins que ma propre merde. Ce qui en dit long. Tu dois êtes douée pour tirer des discours sans aucun sens du néant le plus vide, chapeau bas. Tiens, allez, j'vais t'appeler La Jaquasse, en hommage a ton don inné pour sortir du grandiloquent de garçon coiffeur.."





Le mégot en bouche, les mains de la jeune femme se joignent pour activer le briquet en fin de vie. Une flamme jaillit, puis la première bouffée est tirée. Expirant lentement, avec un plaisir manifeste, la junkie de conclure d'un énième quolibet.


"Et on dit bribe. La bride, c'est pour les canassons, hein. C'est la base de la grammataire. Peuh."

Cixi après avoir médité sur les paroles de Gouranga s'exprime à son tour :

Oui je veux en être. Je n'ai pas bien connu la société pré-crash. Là d'où je viens, je n'ai connu que la domination. Le projet KO m'a ouvert les yeux. Et ces yeux je veux les garder ouvert, c'est pourquoi je veux en faire partie.

C'est vrai que je ne suis pas des plus violentes, mais je saurai en faire usage en temps voulu. Je suis prête à me sacrifier d'autant plus que d'autres l'on fait avant moi et maintenant. J'en ai marre de rester les bras croisés à regarder les autres agir. Je veux me bouger et me lever le matin en ayant un but.

Seth se fesait discret, aussi bien lorsque le grand Noir parlait, que dans la vie de tous les jours.Il grillait clope sur clope, et obeissait aux ordres.
Dans la peinombre, il sortit un magnifique zippo Jack Daniel's de son vieil treilli troué et s'alluma une cigarette.

Dit moi la pseudo Junkie, t'as cru qu'avoir les bras comme du gruyere et fumer un vieux cul de pet secher pouvait te donner des airs superieur ?
C'est pas parce que t'es tombée au fond du trou et que t'as tellement peu de volonté pour resortir que les autres sont ignorants.

Mais on est pas là pour se taper les uns sur les autres, au contraire. Moi c'est Seth.

Se tournant vers Gouranga

Tout m'va comme l'a dit la belle, faut qu'on signe avec quoi ?

Après avoir médité quelques temps en silence, attendant une éventuelle intervention supplémentaire, Gouranga revient à la réalité. Brassant l'air devant lui de ses mains afin de dissiper la fumée de cigarette, qui manifestement le dérange, il reprend.

-Bon, z'avez fini de dire d'la merde, oui ? J'vous l'répète : j'en ai strictement rien à carrer de vos raisons. J'veux juste savoir si vous êtes prêts à faire c'qu'il faut pour la cause qu'est l'anarchie...

Son regard s'arrête sur Cixi

...à savoir, avoir recours à la violence si c'est nécessaire...

Se retournant vers Natalya, il poursuit :

... ou au contraire, savoir s'contrôler si besoin est ? Vous remarquerez que j'vous aide vu qu'il s'agit d'une question fermée. Oh, tant que j'y pense, arrêtez votre délire sur la signature, les contrats c'est pas trop l'genre d'la maison. Un mot, un seul, suffira amplement ... car j'ai très bonne mémoire...

Se croisant les bras, il les toise d'un regard dur

J'vous écoute.

Bras croisés sur sa maigre poitrine, Natalya hoche mollement la tête, le mégot fumant toujours accroché à ses lèvres pâles.


"Ouaip."

Elle répond après Natalya d'une voix sûre :

- Oui

Oui

Un mince sourire étire ses larges lèvres, et il conclut ainsi :

-Parfait, j'crois que tout est dit...

Après un silence, il rajoute :

-Tout est ok j'vous ai dit. Tirez vous.